On utilise le mot Aborigène avec une majuscule pour désigner des ethnies qui vivent de façon très différentes les unes des autres. Ce qui lie tous les Aborigènes, ce sont leur croyance commune dans le Rêve ou le Temps du Rêve. Cette notion est capitale dans la vie religieuse, culturelle et sociale des Aborigènes.
Ce que les Warlpiri nomment « Jukurrpa » et les Aranda « Alchera » est traduit maladroitement par deux termes, le « Rêve » et le « Temps du Rêve ». On peut y rajouter un autre sens, celui de la loi. Ces termes de Rêves n’ont strictement rien à voir avec nos définitions (sauf que la vision onirique est un moyen d’entrer en contact avec les Ancêtres, avec le monde du Rêve).
Cette notion complexe désigne un espace temps parallèle et le Temps des origines et se réfère donc à la fois à une dimension sacrée actuelle et au passé.
Les Aborigènes pensent qu’il y a très longtemps la terre était plate, noire, sans vie. Des esprits qui se trouvaient sous terre ou dans le ciel à l’état larvaire se sont éveillés, sont sortis de la terre ou sont tombés du ciel et, par leurs actions, ont créé la vie et le relief (tel héros s’engouffrant ici dans la terre créant un point d’eau, ressortant là, faisant apparaître une montagne…). Ces êtres pouvaient changer de forme à volonté, passer d’une forme humaine à une forme mi-homme mi-animal, et possédaient des capacités physiques extraordinaires puisque un Ancêtre Ver pourra voler, un Poisson marcher et parler. Avant de disparaître ils ont donné vie à une espèce animale ou végétale qui porte son nom ou à un élément naturel : dingo, kangourou, larve witchetty, liane serpent, bâton à fouir, Eau, Lune,…
Ce sont ces démiurges qui ont institué les rites et les règles sociales. Le Rêve est à l’origine de toute chose, il donne une explication à tous les phénomènes (comme la pluie, le cycle des saisons,…), il est donc la Loi.
Tout ce qui existe à son origine dans le Rêve. Les dingos existent parce qu’il y a un Rêve de Dingo et ainsi de suite pour tout et une fois mort on se fond à nouveau dans le Rêve.
Les croyances aborigènes sont liées au totémisme. Chaque homme descend de l’un d’eux et même, est une partie de lui et ainsi il existe des hommes-goannas, des hommes-kangourous. Les Aborigènes pensent que chaque individu est relié à l’un de ces Esprits Ancestraux mais aussi à tout ce qu’il a créé, par exemple les dingos, qu’il dit alors être ses frères et qu’il ne peut donc chasser ou manger, mais aussi les sites, comme les points d’eau, les rochers, les arbres, qui deviennent autant de sites sacrés. Ce lien se nomme Rêve. L’individu associé à un Rêve, pour maintenir le lien qu’il a avec son Ancêtre et ce qu’il a créé, doit effectuer des rituels sur ces lieux sacrés avec les autres membres qui partagent le même Rêve. Ils sont considérés comme les gardiens des sites. Pour nous, Le désert évoque l’aridité, une terre particulièrement inhospitalière et il est vrai que de nombreux explorateurs y laisseront la vie. Le pays des Aborigènes n’est pourtant pas pour eux une vaste zone hostile, mais un vaste lieu baigné par l’énergie des Ancêtres. La force vitale des grands Ancêtres du Temps du Rêve imprègne toujours le milieu ambiant, les êtres vivants, les rochers, les points d’eau ou le soleil. C’est pourquoi l’Aborigène pense que sa vie est en relation avec tout ce qui l’entoure.